« Faut pas croire tout ce qu’on dit » : en environnement, ou en économie?

Étienne Leblanc, journaliste spécialisé en environnement à Radio-Canada,  présente une longue introduction objective sur la volonté à Paris de restreindre la hausse de température à 2°C, voire 1,5°. Et après, face à un rapport récent du GIÉC de 400 pages, Philippe Crabbé, professeur émérite en économie de l’environnement à l’Université d’Ottawa et ancien membre du GIÉC, insiste qu’il n’y a aucune chance que ce qui est nécessaire pour 1,5°C soit mis en place, et les différences entre les deux objectifs sont énormes.

Le véritable défi n’est pas environnemental

Le 20 octobre dernier à Radio-Canada, à l’émission «Faut pas croire tout ce qu’on dit» de Michel Lacombe, c’était un nième échange sur le défi des changements climatiques, inscrit comme souvent dans le cadre de l’environnement comme thématique, cela ayant obtenu une certaine attention à la fin de la campagne qui vient de se terminer. Le titre: «Changements climatiques: la politique, incapable d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris?».

On ne le dit pas souvent, mais la réponse aux changements climatiques nécessite une mise en question de notre civilisation même – ce n’est d’aucune façon une intervention typique des efforts de mitigation du mouvement environnemental pendant des décennies. C’était un échange, de par sa catégorisation, qui ne pouvait donc pas mener loin.

Par ailleurs, Normand Mousseau, professeur en physique à l’Université de Montréal et un des panelistes, a publié en 2015 un livre sur les obstacles à l’effort de gagner la guerre, mais restant apparemment optimiste avec des suggestions et des propositions tout au long du livre comportant, non pas un changement de paradigme de notre économie, mais un changement de stratégie de la part des gouvernements en restant dans le paradigme. Il n’est pas intervenu souvent dans la discussion (mais c’était difficile de distinguer à l’occasion entre les hommes au panel).

Mousseau, co-président de la Commission sur les enjeux énergétiques du Québec (CEÉQ), avait formulé une illustration du défi du gouvernement de l’époque, soit de réduire de 25% les émissions québécoises de GES.

Gérer les émissions comporte un changement de société

Gérer les émissions comporte un changement de société, les objectifs ici étant bien inférieurs à ce qui sera nécessaire.

Le panel de Lacombe a noté qu’il n’y a pas beaucoup de tels efforts pour concrétiser les défis actuels. Aussi bien dire que c’était impossible, dans le temps, et aujourd’hui.

Défis insurmontables

Aujourd’hui, ce défi quantifié avec échéancier ayant à toutes fins pratiques été relegué aux oubliettes, de nouveaux défis se présentent avec plusieurs années passées sans rien faire: – 37,5% pour 2030 pour le Québec (mais le GIÉC propose une réduction de 45%), – 80% ou -90% pour 2050. L’atteinte de tels objectifs est aussi illusoire que celle proposée par le gouvernement Marois, et c’était une sorte de sous-thème de l’échange à l’émission, sans qu’il n’ait jamais été abordé de front et explicitement par les participants.

Steven Guilbeault, longtemps avec Greenpeace et Équiterre mais qui allait quitter ce dernier dans les jours suivants, y était également avec une sorte d’optimisme qui lui est propre, soulignant face à certaines réflexions des autres que le public n’est tout simplement pas ouvert à un discours qui souligne l’importance des défis. Ce qui est déconcertant, et cela semble être quasiment implicite dans de nombreuses interventions des leaders du mouvement environnemental, c’est que cela suggère que le discours environnemental face aux crises, incapable de dire la vérité, frôle la malhonnêteté. Cela est normal, même si questionnable, pour une entreprise dans ses efforts de marketing: si elle ne rejoint pas ses clients potentiels, c’est l’échec de son produit. Ce n’est pas normal dans les efforts de la société civile, et un échange sur l’idée de lobbying a occupé une partie assez importante de l’échange.

Les lobbies

C’est Philippe Crabbé qui introduit l’idée, dès les premières minutes, que les scientifiques aujourd’hui sont obligés de devenir des lobbyistes face aux décideurs, cela en raison de l’activisme de plusieurs (dont Suzuki et Hansen). L’échange permettait de faire certaines distinctions, surtout à l’effet que les lobbies commerciaux et économiques existent pour défendre leurs interêts propres, ce qui est normal encore une fois dans les activités du secteur privé. Les scientifiques, dans ce cas-ci, les experts en matière de changements climatiques, provenant de plusieurs domaines scientifiques, n’interviennent pas pour défendre leurs intérêts; elles interviennent pour fournir à la population tout comme aux décideurs les meilleures connaissances qu’elles détiennent, cela toujours dans un contexte où la science ne prétend jamais à la certitude. Qu’ils se transforment en lobby on non, ils n’ont finalement rien à vendre que des problèmes pour les décideurs…

La suggestion de Crabbé de comparer les scientifiques aux lobbyistes semblait provenir d’un jugement de sa part que les décideurs n’ont pas jusqu’ici écouté, dans un contexte où les connaissances touchant les changements climatiques suggèrent la nécessité d’actions dramatiques et un changement d’approche. Mousseau a bien souligné que des interventions des scientifiques n’est rien de nouveau, remontant au moins jusqu’aux années 1950 dans les débats sur le développement de capacités nucléaires par les puissances développées. Bien que, comme aujourd’hui, de telles interventions aient pu comporter une part de jugement moral, les connaissances touchant les impacts d’un recours militaire aux armements nucléaires représentaient des informations importantes pour la prise de décision – histoire d’hiver nucléaire, par exemple, et d’autres scénarios catastrophiques.

Bref, l’échange sur cette question, qui est revenue à deux ou trois reprises et incluait Johanne Whitmore, chercheuse principale à la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal et autre paneliste, provenait du point de départ, où le défi des changements climatiques était classé comme un enjeu environnemental.

Un effort de guerre, ou d’après guerre

Ce classement n’a tout simplement plus de sens, et même d’autres enjeux environnementaux n’ont presque plus de sens lorsque définis ainsi. Nous regardons la pollution des océans par le plastique comme un (gros) problème environnemental. Il est pourtant évident qu’il s’agit – comme les changements climatiques – comme un enjeu de société et une manifestation de caractères structurels dans la société. Il n’est plus possible de voir les efforts de «mitigation» des impacts environnementaux comme ayant du sens face à la taille des défis/problèmes et en reconnaissant les cuisants échecs lorsque la mitigation a été essayé, comme dans le cas du recyclage. Il s’agit plutôt, d’une perspective réaliste, de situations exigeant un changement de paradigme.

Les panelistes ont abordé l’importance des défis en recourant comme un exemple à l’effort des Alliés après la Deuxième Guerre mondiale de procéder à la reconstruction de l’Europe. Il faudrait, disaient-ils, que les changements climatiques soient LA préoccupation, LA priorité, pendant une décennie pour les aborder comme il faut, ce qui semblait obtenir l’adhésion des participants. Sauf qu’il y avait unanimité aussi – avec raison – que les décideurs ne feraient jamais cela, et voilà le problème, de l’échange à l’émission, du débat de société qui court depuis des décennies.

Nous savons, grâce aux scientifiques, que nous sommes devant une catastrophe qui s’annonce, pas pour demain dans toute son envergure, mais pour d’ici quelques décennies, disaient-ils. Nous agissons, bien consciemment, en fonction de notre évolution, de notre comportement comme êtres humains vivant en société, pour gérer le proche avenir, remettant à plus tard la gestion de décisions nécessaires dont les résultats ne se feront pas sentir dans l’immédiat. Et nous agissons ainsi parce que nous sommes incapables d’imaginer ce qui est requis, une mise en question de notre paradigme de développement.

On sentait ceci lors de brefs échanges au panel sur l’idée qu’il faut quand même continuer à essayer d’améliorer notre niveau de vie, cela sans référence aux milliards de pauvres qui n’y pensent même pas, cela sans référence à l’empreinte écologique de l’humanité qui nous montre sans beaucoup de nuances nécessaires que nous vivons au-delà des capacités de la planète à soutenir la vie des riches telle qu’elle est menée actuellement.

Urgence ou pas?

Fascinant dans l’échange était la réflexion sur la démission de Nicolas Hulot. Guilbeault suggérait que Hulot aurait dû attendre un peu, nous fournissant le calendrier pour l’adoption de lois et de règlements qu’il suggérait que Hulot ne comprenait pas. Clairement implicite dans les commentaires: l’urgence sentie par Hulot n’est pas là, qu’il faut prendre le temps de travailler dans le système actuel, cela en respectant ce que la population est prête à recevoir comme information venant de la société civile et des décideurs. Une telle proposition passe proche d’être incompréhensible, devant l’urgence tout récemment soulignée par le GIÉC, devant la  projection de Halte à la croissance qui nous donne, maintenant 49 ans de données à l’appui, jusqu’en 2025 environ, devant les urgences soulevés dans une multitude de secteurs par une multitude d’acteurs.

Lacombe intervient en suggérant qu’on n’a plus ce temps-là.  Guilbeault réplique que l’on peut arriver, selon les scientifiques, avec objections d’un paneliste que je n’identifie pas – et de moi-même: quels scientifiques??? – et fournit un autre calendrier des «avancés» des pays jusqu’ici, proposant qu’on doit faire mieux, et faire plus vite. La même voix intervient, insistant que le gouvernement n’a rien mis en place depuis Paris.

 

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17 Commentaires

  1. Pierre Alain Cotnoir

    Je commence à me questionner sur les motifs qui font que des militants environnementaux, devenus portes-paroles d’organisations écologiques en viennent à nourrir l’illusion que « tout va très bien madame la marquise, pourtant, il faut que l’on vous dise, on déplore un tout petit rien », alors que tout les indicateurs montrent que la majorité des nations n’atteindront même pas les objectifs de réduction des GES qu’ils se sont donnés, objectifs pourtant largement insuffisants pour limites la hausse de la température moyenne sur Terre à 2°C, mais entraînant celle-ci vers un accroissement de l’ordre de 3°C à 4°C. Autrement dit, l’on se dirige tout droit en territoire inconnu avec une augmentation catastrophique de plus de 4°C avec des effets de rétroaction positive encore mal cernés pouvant entraîner l’homéostase de la température terrestre vers un nouvel état d’équilibre mortifère pour la vie même sur Terre. Aussi bien dire qu’un effondrement quasi assuré de cette civilisation thermo-industrielle est désormais à l’ordre du jour.

    Alors je ne comprends pas que des Sidney Ribaux (entendu répondre lors du débat tenu par Le Devoir/Le Monde qu’il était possible de concilier l’exploitation des sables bitumineux et la lutte aux changements climatiques), Karel Mayrand (présentant les efforts lilliputiens contenus dans cette vidéo https://www.youtube.com/watch?v=Ia2S4w0wD6U comme une réponse appropriée vis-à-vis des dégâts causés par le système économique actuel) et finalement Steven Guilbeault (reprenant le refrain passablement usé qu’il suffit d’un peu de bonne volonté, assaisonné de la mise en place d’un marché du carbone ou d’une taxe sur celui-ci, pour atteindre le Graal du développement durable), jouent ainsi les mystificateurs. Est-ce parce qu’ils entendent garder leur « jobs » ou leur « aura » de grands manitous environnementaux. En tout cas, ils ne jouent aucun rôle utile en faisant prendre des vessies pour des lanternes aux gens que les écoutent.

    Je préfère cent fois l’énonciation des constats des Pablo Servigne, Gauthier Chapelle, Raphael Stevens que les élucubrations de lendemains qui chantent de nos écolos auto-proclamés. À part quelques-uns comme Harvey Mead, il manque cruellement chez nous de gens pour alerter une population qui, me semble-t-il, mérite mieux que de se faire tartiner avec des contes de fée.

    • Sylvie Woods

      Les personnes qui ont pris le contrôle des organismes environnementaux comme les messieurs Guilbeault, Ribaux, Suzuki et Karel Mayrand et Mme Laure Waridel font partie de la grande masse des croyants qu’a produit la religion indutrielle. Que nous le reconnaissions ou non, les «modernes» que nous croyons être ont d’abord été des sujets issus du christianisme.
      Pierre Musso, dans son livre «La religion industrielle. Monastère, manufacture, usine» paru en 2017 démontre comment le christianisme a permis l’essor de l’industrialisation de l’Occident. Ce sont entres autres les communautés religieuses comme les St-Simoniens qui ont soutenu la propagande du progrès technique à compter du XVe siècle, du développement des corporations et entreprises du temps lié au productivisme et au rapport de domination et d’exploitation de la nature. L’homme étant à l’image de Dieu, le voici au XXe siècle sujet-roi. Nous sommes issus de près de 800 ans de ce mariage entre le christianisme et la culture industrielle. Il s’agit d’un imaginaire impérial qui a créé l’esprit gestionnaire dont l’environnement constitue un dossier à gérer.

      Nos environnementalistes pratiquent le Grand Management du développement durable. Le vidéo de la Fondation Suzuki dont M. Cotnoir fait mention ne vous rappelle-t-il pas la propagande des témoins de Jéhova « Vers demain» et me fait penser au film de Cyril Dion « Demain ». Le sujet-roi en pleine maîtrise de son destin qui va faire croître son potager en permaculture en pensant pouvoir nourrir 12 milliards d’humains en 2050!!!

      Ce film présente des solutions individuelles pour camoufler la perte de contrôle collective et déresponsabilise l’État et les gouvernements. Pour changer de paradigme, il faut reconnaître que les croyances chrétiennes et industrielles nous ont fabriqués, nous les occidentaux. Peut-être que pour adopter une vie écologique, il nous faudra regarder de quelles croyances nous somme faits. Le mensonge et la propagande ont souvent soutenu les pires atrocités: pour que les personnes juives embarquent dans les trains de la mort en 1942, on leur avait fait visionner des images idylliques des camps de travail qui les attendait afin qu’elles ne se révoltent pas.

    • Si on laisse jouer par distraction le site YouTube, les prochaines phrases après la pub sur Demain, parlant de Sainte-Foy et son projet Phare, souligne que «la croissance est vitale»…

  2. Oui, le video référé, « Demain, le Québec » est pas mal ‘lunettes roses’ mais peut-être est-ce volontaire: les études de marketing montrent que de décourager l’auditoire les fait décrocher. Je n’approuve pas cette approche mais je comprends leur position éditoriale. La conséquence est bel et bien un assoupissement de la conscience collective, du type « tout va très bien, madame la marquise. » On devrait continuer la chanson: « Pourtant, il faut, il faut que l’on vous dise, On déplore un tout petit rien:  » [rajouter ici votre statistique désolante].

    Concernant la capacité toujours épatante du capitalisme de phagocyter les mouvements de résistance (ici, manifestée par le greenwashing) j’ai croisé ce texte pertinent, republié sur le site du Monde Diplo:

    « Leur écologie et la nôtre » Visionnaire, le philosophe André Gorz avait prévu, dans ce texte paru en 1974, la récupération de l’écologie par l’industrie, les groupes financiers — en un mot, le capitalisme.

    https://www.monde-diplomatique.fr/2010/04/GORZ/19027

  3. Raymond,

    Merci de ce lien au texte superbe d’André Gorz. J’ai connu le travail de Gorz en faisant mon travail sur l’IPV. Il pourrait faire paraître son texte aujourd’hui, tellement les choses n’ont pas changé…

    Les groupes qui agissent comme vous décrivez le font de façon tout à fait consciente et délibérée. Comme j’ai essayé d’esquisser dans une présentation faite hier, ils se trouvent confrontés entre une approche qui dirait la vérité mais qui sera rejetée par l’auditoire et aboutirait à la marginalisation et une approche où ils jouent comme n’importe quel autre publicitaire mais passent proche du mensonge.

    Voilà pourquoi j’essayais de faire la distinction dans mon article ici entre le lobbying des entreprises privées et le travail de la société civile. Celle-ci est finalement dépourvue de moyens face à la maîtrise des communications par les publicitaires; cela est derrière l’échec du mouvement environnemental et social, et de l’effort de sensibiliser le public par les deux au fil des décennies, clé pour la présentation de mon livre. Reste que je trouve que le choix de rendre le travail de la société civile un travail de marketing est un mauvaix choix, et finira rapidement par rebondir contre elle.

    Gorz pose bien la question :

    Quand, après avoir longtemps résisté par la force et la ruse, il cédera finalement parce que l’impasse écologique sera devenue inéluctable, il intégrera cette contrainte comme il a intégré toutes les autres.
    C’est pourquoi il faut d’emblée poser la question franchement: que voulons-nous? Un capitalisme qui s’accommode des contraintes écologiques ou une révolution économique, sociale et culturelle qui abolit les contraintes du capitalisme et, par là même, instaure un nouveau rapport des hommes à la collectivité, à leur environnement et à la nature ? Réforme ou révolution ?

    • Sylvie Woods

      Bonjour,

      Lorsque je lis vos commentaires, je perçois une dichotomie dans votre discours entre les environementalistes collaborateurs du gouvernement en regard de leur inertie face aux crises écologiques. Le changement nécessaire pour la survie de l’humanité et pour restaurer la résilience des écosystèmes sera d’ordre anthropologique, comme sa cause. La difficulté qui se pose pour la population sera de se confronter aux limites et aux interdits qui devront être mis en place pour mettre fin à des comportements destructeurs tels que le droit de polluer – par l’automobile, par les déversements d’eaux usées dans le fleuve, par l’usage des pesticides, par la croissance de la population, l’achat de produits fabriqués par l’énergie du charbon ou de l’extraction de métaux rares – voir Les Énergie low tech de Philippe Bihouix. André Gorz a tenté de défricher le champs de l’écologie et de poser les jalons de ce que pourrait être une société écologique afin aussi de libérer la créativité de la population esclave du travail temps plein, aliéné dans une société basée sur une croissance destructrice. Cependant, son erreur a été de croire que les gains de productivité pourraient être détournés de la consommation pour être investi dans du temps libre et des activités axées sur la communauté.

      Les gains de productivité font partie d’un paradigme économique qui est remis en question par la destruction des écosystèmes et le réchauffement climatique: les coûts liés aux événements climatiques extrêmes accapareront la richesse de nos sociétés. La société capitaliste, la population l’a dans la peau et il faudra qu’elle soit confrontée à toute sa démesure, celle que l’État lui a permis d’exercer depuis 100 ans.

      • Je ne vois pas la «dichotomie» que vous attribuez à mes/nos commentaires…

        Quant à Gorz, je ne prétends pas avoir retenu tout ce que j’ai lu de lui, mais vos propos ne correspondent pas au texte proposé par Lutz ni à mon sens de ses interventions. Il ne jouait pas avec le paradigme et la méthodologie du modèle économique pour faire ses propositions, mais proposait bien plutôt la révolution mentionnée dans la citation plutôt que la réforme qui a marqué – et marque toujours – le mouvement environnemental.

        • Sylvie Woods

          Bonjour M. Mead,

          Je suis d’accord avec tous les commentaires échangés ici et je suis aussi abasourdie que vous par les discours des représentants des organismes environnementaux qui prennent la posture de lobbyiste et soutiennent l’inertie du gouvernement face au réchauffement climatique. Toutefois, je ne suis pas surprise et si mon commentaire vous semble ne pas concerner votre propos, c’est que je crois qu’il faut saisir la position des environnementalistes institutionnalisés actuels dont votre article fait mention d’un point de vue anthropologique. Ces groupes ont un rapport institutionnel étroit au pouvoir gouvernemental; certains comme Guilbeault, Mayrand ou Mousseau ont même fait partie de groupe conseil sur l’énergie ou autres, auprès du gouvernement Couillard. À ce titre, ils font partie du Management et véhiculent la propagande gestionnaire qui se base sur la rationalité techniciste (énergie verte) et «scientiste» (attendons d’avoir la preuve absolue que la science nous fournira sur les impacts du CO2 pour fixer le seuil à 1,5 degré ou 2 degré). Pour André Gorz: je l’ai lu et admiré, mais beaucoup de ses positions sont dépassées face au défi de l’humanité actuelle: toute son argumentation était soutenue par une pensée marxiste, même s’il l’a beaucoup critiquée et remis en cause. Quant à la vidéo que M. Cotnoir nous a permis de voir, ce que je voulais apporter comme commentaire est que ces manœuvres de propagande sont post-hitlériennes: il a été démontré que des dirigeants de conseils juifs ont participé a faire accepter par les communautés juives de prendre le train de la mort, en leur faisant croire que là où on les amenait ce serait une communauté de travail très intéressant pour eux (voir Lanzman). La vidéo de la Fondation Suzuki, fondamentale, est outrancière par son mensonge; la population doit faire face à la vérité pour agir. En ce sens, je crois que mes propos rejoignent les vôtres.

          • Louis Bélanger

            Dans le cas de Normand Mousseau, c’est auprès du gouvernement Marois qu’il a oeuvré, à titre de coprésident de la Commission sur les enjeux énergétiques du Québec.

      • Raymond Lutz

        Mme Woods, je vous trouve bien lapidaire.

        Un, l’État n’est pas responsable et de deux, par « La société capitaliste, la population l’a dans la peau. » je ne saisis pas trop ce que vous avancez…

        Suggérez-vous que le « bon peuple » est incapable de saisir l’impasse socio-économique dans laquelle nous sommes? Pourtant l’homme de la rue est bien conscient que « quelque chose ne va pas ». J’en veux pour exemple cette étude faite auprès de 5500 américains au sujet de l’inégalité des richesses dans leur magnifique pays (Norton 2011). Ils sont beaucoup plus ‘socialistes’ qu’on le présumerait (les 2 premières minutes de cette vidéo en illustre les résultats https://www.youtube.com/watch?v=QPKKQnijnsM).

        Je penche pour une prise de conscience assez brusque, qui fera ressortir le meilleur de nous-même (partage et entraide) et qui resserra la cohésion sociale lors de la fin (j’ai en tête le film Melancholia de Lars von Trier).

        Cet avis est je crois partagé par ce psychologue Jungien qui affirme « Chaos, violence, war & barbarism: why humanity and peace will prevail » dans https://www.youtube.com/watch?v=uA1Zz5cFngo

      • (bis) Mme Woods, je vous trouve bien lapidaire.

        Un, l’État n’est pas responsable et de deux, par « La société capitaliste, la population l’a dans la peau. » je ne saisis pas trop ce que vous avancez…

        Suggérez-vous que le « bon peuple » soit incapable de saisir l’impasse socio-économique dans laquelle nous sommes? Pourtant l’homme de la rue est bien conscient que « quelque chose ne va pas ». J’en veux pour exemple cette étude faite auprès de 5500 américains au sujet de l’inégalité des richesses dans leur magnifique pays (Norton 2011). Ils sont beaucoup plus ‘socialistes’ qu’on le présumerait (les 2 premières minutes de la vidéo « Wealth Inequality in America » en illustre les résultats).

        Je penche pour une prise de conscience assez brusque, qui fera ressortir le meilleur de nous-même (partage et entraide) et qui resserra la cohésion sociale lors de la fin (j’ai en tête le film Melancholia de Lars von Trier).

        Cet avis est je crois partagé par le psychologue Jungien Jerry Kroth qui titre « Chaos, violence, war & barbarism: why humanity and peace will prevail » dans https://www.youtube.com/watch?v=uA1Zz5cFngo

        • Sylvie Woods

          À M. Lutz,

          Ce que vous interprétez comme «lapidaire» m’apparaît comme réaliste: le réchauffement climatique et la destruction des écosystème est tributaire de «l’esprit industriel» qui a fondé l’État et ses institutions. Voir L’autre bible de l’Occident de Pierre Legendre, anthropologue. Le fondamentalisme économique dans lequel nous vivons est fondé sur des croyances ancrées et mises en images en boucle dans tous les médias occidentaux (télévision, journaux, radio, etc.) au quotidien. J’ai mentionné que nous avions le capitalisme dans la peau, mais je devrais dire que nous l’avons dans la tête également: c’est la fabrique de l’homme et de la femme occidental, comme dirait Pierre Legendre, qui nous mène là ou nous en sommes aujourd’hui, vers la décivilisation. Alain Supiot, juriste historien du droit est également à lire pour comprendre l’idéal délirant qui nous fait croire encore à la religion industrielle et à la rédemption par les technologies vertes. À lire: Le gouvernement par les nombres d’Alain Supiot.

  4. J’ai l’impression que les choses « bougent »… les évènements qui dénotent que la grenouille commence à sentir que l’eau est brûlante (et qui l’incitent à faire de petits sauts) se manifestent de plus en plus rapidement. Dans les derniers mois (et dans un ordre quelconque), je note:

    Victoire en appel en cour Supérieure des hollandais contre leur propre gouvernement face à leur inaction climatique [1];

    démission de Hulot;

    chroniques éclairées (certains diront alarmistes) dans les media mainstream locaux (Lagacé, Laporte et al.) [2];

    sortie fortement médiatisée en France d’un astrophysicien qui sonne l’alarme et qui ose aborder la question de la liberté (et de la coercition) en nos temps précaires [3];

    lancement d’un groupe radical en Grande-Bretagne (Extinction Rebellion) qui incite à la désobéissance civile non-violente [4];

    l’inconfort persistant que suscite l’absence de Legault à la COP24 (dont on peut débattre de l’utilité, certes);

    les critiques elles aussi persistantes des errances climatique de Justin Trudeau

    et finalement il y a quelques jours, cette rencontre où Servigne et le député François Ruffin discutent à bâtons rompus de POLITIQUE [5] dans un café (une vidéo bien montée et bien enregistrée).

    Ceci dit, oui, ça bouge un peu, trop peu et trop tard… mais le mouvement est intéressant.

    [1] Dutch court shoots down government appeal of landmark climate ruling
    [2] La Terre n’est pas un Airbnb – La Presse+
    [3] Réchauffement climatique: Aurélien Barrau, météorite médiatique? – L’Express
    [4] As the fracking protesters show, a people’s rebellion is the only way to fight climate breakdown | George Monbiot | Opinion | The Guardian
    [5] PABLO SERVIGNE & FRANÇOIS RUFFIN : UNE DERNIÈRE BIÈRE AVANT LA FIN DU MONDE – YouTube

    https://www.youtube.com/watch?v=6J1Lzs-iYAI

    pour les URL (bloqués par le filtre de Spam) voir https://pinboard.in/u:lutzray/t:commentaireHM

    • Pour les quelques vidéos que j’ai vues avec Pablo Servigne, dont celle mentionnée ici, l’auditoire a vraiment l’allure d’un groupe de marginaux (comme nous), Dans les premières pages (disponibles en ligne) de son livre, il souligne qu’il rencontre des gens qui partagent son analyse; j’ai un peu de difficulté à croire que, lors de ses rencontres, il est en contact avec le grand public. Moi aussi, lors de mes deux dernières présentations, j’ai senti un partage de point de vue, mais je ne prétendrais pas que mes auditoires représentaient le grand public…

      • Raymond Lutz

        oui,il y a pas mal de têtes grises dans ce café avec Servigne… mais l’important, c’est Ruffin! Il a une grande gueule et « ils » sont obligés de l’écouter! 😎

        https://www.youtube.com/watch?v=2UyaNPzu4W4

        • Pierre Alain Cotnoir

          Je préfère cette conférence-ci donnée par Pablo Servigne devant un parterre d’étudiants en agronomie, sans doute l’une de ses plus complètes. https://youtu.be/SqasBu0pfmk

          • oui, merci pour le lien. https://youtu.be/SqasBu0pfmk?t=5859 à 1h37 il aborde le « fortified ville syndrome »: l’illusion qu’entretiennent certains ultrariches qu’ils pourront s’en tirer grâce à leur moyens matériels (air climatisée, villa sur-élevée, génératrice, gens d’armes). Je fais l’hypothèse que ce syndrome est en bonne partie reponsable de l’attentisme (criminel) de nos élites.

            Oui, merci. Cette vidéo est fort instructive, autant pour le discours de Servigne que pour la période de questions qui dure 1h15! La majorité des questions sont très pertinentes. On y perçoit les inquiétudes et les espoirs des jeunes (et moins jeunes), tout y passe (technologie salvatrice, morcellement des actions, etc..).

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