Croissance verte, croissance inclusive – le jeu continue, à Davos

Mon recours à des analyses critiques de documents venant des grandes organisations internationales peut certainement paraître redondant pour plusieurs, et la lecture que j’en fais ne me met pas en extase. Reste que la présence de nombreux adhérents à l’économie verte et, plus généralement, à l’espoir que nous allons pouvoir prendre le contrôle de nos crises environnementales, sociales et économiques avec une transition en douceur m’amène à revenir sur les questions de temps en temps, pour souligner les failles dans l’approche. Par ailleurs, le sens de justice est un critère important du récent Manifeste pour un grand bond en avant, et c’est l’objectif clé de l’effort du Forum économique mondiale (WEF) de Davos dans le document commenté ici, ciblant la «croissance inclusive», complément de la croissance verte de Rio+20… À noter la récente intervention de Mark Carney mettant un accent sur de véritables coûts de la transition vers l’économie verte, et une échéance serrée pour celle-ci, rare bémol parmi ses promoteurs.

C’est comme si le rapport de 2009 de Stiglitz, Sen et Fitoussi, analysant toutes les failles dans le recours au PIB comme indicateur, n’a jamais été produit. Le récent document du World Economic Forum de Davos (WEF), The Inclusive Growth and Development Report 2015, s’ouvre en laissant de coté les corrections qui s’imposent (finalement, rien de neuf dans cela) et propose d’aller plus loin, en proposan la croissance inclusive :

Inclusive growth has been defined as output growth that is sustained over decades, is broad-based across economic sectors, creates productive employment opportunities for a great majority of the country’s working age population, and reduces poverty. Inclusive growth is about both the pace and pattern of economic growth.

Photo Harvey Mead  Dans le bidonville Kibera de Nairobi, où vivent environ un million de personnes, la vue des châteaux des riches est omniprésente, comme un peu partout dans le Sud.

However one defines it, there is no bigger policy challenge preoccupying political leaders around the world than expanding social participation in the process and benefits of economic growth and integration. A central lesson of the recent financial crisis is the need for a rebalancing of the emphasis placed by policymakers on drivers of what could be considered the “top-line” measure of national economic performance, GDP per capita growth, on the one hand, and factors that influence its “bottom-line” performance in achieving broad-based progress in living standards, on the other. In advanced and developing countries alike, it is increasingly recognized that GDP per capita growth is a necessary but not sufficient condition for the satisfaction of societal expectations.

Even if the precise nature and relative importance of the causes of rising inequality remain in debate, a geographically and ideologically diverse consensus has emerged that a new, or at least significantly improved, model of economic growth and development is required…. This new political consensus about inclusive growth is rooted in a significant widening of inequality, affecting economies at various levels of development. (p.1)

Le constat est unanime à l’effet que la croissance non-inclusive perdure maintenant depuis des décennies et l’intervention de l’élite de Davos sur la croissance inclusive ne pourra être confirmée qu’au bout de quelques autres décennies, selon la définition donnée. Face à son propre constat de risques dramatiques et de tendances lourdes nous menant à une catastrophe appréhendée, Davos fonce dans le déni, répondant à ce constat avec une approche qui ne respecte pas les règles de la gestion de risque, qui exigent qu’il y ait moyen d’établir un lien entre les interventions et les risques. Implicitement, pour les auteurs de ce document, les risques identifiés ne menacent pas dans l’immédiat, ni par leurs impacts ni par leur sérieux.

Une lecture sur le bord de l’inutile

Dans l’effort de rééquilibrage dans ce document, les auteurs ne cherchent pas à tenir compte de l’ensemble des crises identifiées par les rapports sur les risques produits par le WEF chaque année, mais sur celle qui prime parmi plusieurs autres en 2015, celle des inégalités. Ce sera pour un autre rapport (…) l’intégration des coûts des externalités environnementales dans le calcul du PIB à la base de toute l’intervention. Global Risks 2015 laisse transparaître la frousse qui semble saisir les auteurs de cet autre document, mais dans la récente intervention «sectorielle», la frousse disparaît, tout comme le regard sur l’ensemble et sur les tendances lourdes que le premier identifie.

Il n’est vraiment pas nécessaire de continuer la lecture de The Inclusive Growth and Development Report 2015, tellement c’est clair dès le départ que nous aurons droit à des analyses qui ne quittent pas celles des décideurs économiques, omniprésentes, mais soulignées presque partout et en même temps comme déficientes. Un élément important de ce document est d’offrir aux pays la possibilité de se comparer entre eux et de s’inspirer des meilleurs, comme si de telles comparaisons ne sont pas connues depuis des lunes. C’est par le nombre important de variables que les auteurs du document pensent apporter quelque chose de nouveau, couvrant en même temps et en principe l’ensemble des enjeux impliqués dans les inégalités, mais qu’ils ne jugent pas inéluctables dans le capitalisme même. Le nombre est tellement grand que ses auteurs ont renoncé, par ailleurs, à l’idée d’établir un classement général des pays.

The dirty little secret of development economics

En poursuivant ma relecture de The Upside of Down: Catastrophe, Creativity and the Renewal of Civilization de Thomas Homer-Dixon mentionné dans mes derniers articles, je suis retombé sur sa section, dans le chapitre sur les stress tectoniques économiques, soulignant le mauvais calcul de ceux qui visent une amélioration des conditions de développement dans les pays pauvres en mettant l’accent sur une croissance économique améliorée dans ces derniers. Le nouveau rapport s’insèrent là-dedans, insistant sur la nécessité de la croissance mais introduisant des compléments qu’ils voudraient bien croire susceptibles d’en corriger ses effets pervers :

No internationally-recognized policy framework and corresponding set of indicators or measurable milestones has emerged to guide countries wishing to construct a more socially inclusive economic strategy that recognizes broad-based progress in living standards, rather than economic growth per se, as the bottom-line measure of national economic performance.

Strong economic growth is the sine qua non of improved living standards. While a growing national economic pie does not guarantee that the size of every household’s piece will be larger, such an outcome is arithmetically impossible unless the overall pie does indeed expand. Growth creates the possibility of a positive-sum game for society, even if it does not assure it. (p.7)

Comme Homer-Dixon le montre, la proposition de faire monter par la croissance le niveau de vie dans les pays pauvres pour qu’il commence à ressembler à celui des pays riches est une illusion: même en présumant d’un taux de croissance de 1% dans les pays riches – le prévisible actuellement – et de 3,5% dans les pays pauvres – l’espéré actuellement? – , le fossé entre les riches et les pauvres continuerait de s’accroître jusqu’en 2080, et il prendrait jusqu’en 2130 pour atteindre l’égalité des revenus (p.191).

Finalement, l’approche du rapport n’envisage pas un arrêt de la croissance ahurissante (pensons à celle de notre hyperconsommation) dans les pays riches pas plus que dans les pays pauvres. Il vise plutôt des interventions du coté des institutions qui gèrent les activités économiques et sociales, dans le but d’atteindre, pays par pays, des améliorations. Nulle part n’est-il question donc d’une réduction des inégalités entre les pays riches et les pays pauvres, mais plutôt à l’intérieur des pays; c’est finalement presque explicite dans la citation et c’est clair à la lecture du document. Les inégalités entre les pays sont pourtant et en grande partie le risque qui passe proche de terrifier les auteurs de Global Risks 2015.

Les indicateurs comme incitatifs : rien de nouveau, un autre exercice futile avec l’illusion fournie par des chiffres

Un groupe d’indicateurs de base fournit une sorte de fondement pour l’ensemble, et ils sont désignés comme le tableau de bord (Dashboard); par la suite, les 140 indicateurs du Cadre de travail (Framework) sont présentés un par un, le tout à partir de la page 73, dans la section décrite comme des notes techniques. Ils sont déjà tous bien connus. L’idée (p.viii) est de fournir une illustration des conditions permettant d’avancer vers une réduction des inégalités, à travers des indications de performance, cela pour 112 pays dans 4 classements.

Le défi est justement de les rendre utiles pour le travail visant l’inclusion, en fournissant un portrait de tendances. L’approche ressemble beaucoup à celle ciblant l’économie verte: on reconnaît toute une série de mesures dont ceux qui critiquent modèle économique font la promotion depuis des décennies, et on signale l’espoir que l’on pourra dans un avenir plus ou moins proche finalement les mettre en œuvre.

Le tableau de bord comporte trois sous-groupes d’indicateurs jugés fondamentaux: a) croissance et compétitivité; b) équité par rapport aux revenus; c) équité intergénérationnelle. Le groupe a) représente les conditions pour permettre la croissance; le groupe b) fournit un portrait du niveau d’inégalité présent; le groupe c) aborde la question du legs des générations ayant créé les crises à celles qui vont suivre (pas question que ce soit aux générations actuelles…).

In the first category are indicators providing a measure of whether the fundamentals are in place in terms of competitiveness, labor productivity performance, and sustained economic growth. The second illustrates how widely income is distributed (pre- and post-transfer inequality), the progress of median living standards (in terms of median household income growth), poverty rates, the labor share of income in advanced countries and proportion of middle-class households in upper-middle, lower-middle and low-income countries. Lastly, the Dashboard provides an inter-temporal look at equity from both an environmental (natural capital depletion) and fiscal (public debt) perspective in order to illustrate whether economic performance is being pursued at the expense of future generations. (p.9)

On note dès le départ l’importance de la concurrence, qui ne peut que laisser des perdants et qui crée d’elle-même des inégalités de résultat. Les indicateurs 0.01-0.10 fournissent donc un portrait bien connu et global. L’indicateur 0.09 insère dans le portrait les comptes de capital naturel et de la mesure de la richesse, établis par la Banque mondiale et représente presque la seule prise en compte des enjeux environnementaux. Le document de la Banque mondiale qui les présente souligne dès son premier paragraphe que «les indicateurs comme la croissance du produit intérieur brut, utilisés par des ministères de finance et de développement partout, ne tiennent pas compte de l’épuisement des ressources naturelles» (p.xi) (soit leur liquidation – p.4). L’épargne (ou le revenu) nette ajustée, ce qui serait en cause dans l’indicateur 0.09, est définie comme «l’épargne nationale nette moins la valeur de la dégradation environnementale, moins l’épuisement des actifs souterrains et la déforestation, plus les dépenses en éducation» (p.37) – pas mal les principes derrière l’IPV.Tableau de la page 28 de The Changing Wealth of Nations, fournissant use idée des inégalités en fonction de la véritable richesse plutôt que du PIB, qui mesure l'activité économique mais que de nombreux auteurs associe directement à la richesse.

L’indicateur 0.10 couvre la dette publique et alors qu’il n’y a pas un pays sur la planète qui n’est pas (trop) endetté, la suggestion est que la présence de la dette représente une injustice envers les générations futures et doit être, disons, diminuée… En dépit des passages dans le document qui semblent critiquer l’approche de l’austérité, le fondement de cette approche se situe directement dans le tableau de bord: la marge de manoeuvre pour presque l’ensemble des interventions suggérées par le cadre de travail est donc restreinte.

Sept piliers d’une économie égalitaire

Cette marge de manoeuvre à toutes fins pratiques inexistante est, finalement, la situation qui saute presque aux yeux en lisant les indicateurs des sept piliers qui suivent, comportant 15 secteurs où les enjeux politiques opèrent en permanence. Dans le pilier 1, un premier groupe 1.01-1.08 porte sur la question de l’accès et la présomption est que l’éducation représente une forme de capital humain et est positive pour l’économie – si les éduqués sont formés et prêts pour le travail disponible… Voilà quelque chose où nous avons une certaine expérience, cela dans une société riche (il y a trois autres classements dans le document: pays de revenu moyen haut, pays de revenu moyen bas, pays pauvres). Le  Québec à cet égard figurerait bien, peu importe les résultats des débats actuels, mais ces débats donnent une petite idée de ce qui se passerait dans des pays des autres classements dans l’effort d’intervenir. Ce ne sont pas seulement les dettes, mais les déficits qui viendraient immédiatement à l’avant-scène. Les auteurs insistent que c’est payant de développer le capital humain, mais ils ne situent pas les enjeux de l’action dans le cadre de leur propre tableau de bord. La même situation prévaut pour les indicateurs 1.09-1.15 portant sur la qualité de la formation et pour ceux 1.16-1.22 touchant les question d’équité, à la base du travail.

Le deuxième pilier est celui du travail et de sa compensation; il n’y a aucune référence au constat, dans l’analyse des risques qui fournit la motivation pour ce travail, que le chômage et le sous-emploi sont devenus structurels pour l’avenir. L’approche, et sa faiblesse, sont déjà fournies à la page 15, dans la boîte 5 portant sur l’impact de la technologie sur l’ensemble du modèle :

History suggests that any technology which displaces jobs also creates new kinds of jobs, which often require higher skills and pay better. However, it is unclear whether this trend will hold as rapid progress in artificial intelligence and robotics promises to diminish the range of tasks at which humans can outperform machines. Even if enough new categories of jobs emerge, managing the transition will become ever more challenging. Already, as more of our lives are lived online, individuals without access to technology are getting increasingly excluded from creating value and participating in social structures.

Nonetheless, there is ample evidence that technological advancement has strong potential to foster inclusive growth and job creation, notably by empowering the self-employed and small enterprises. One study in Niger found…

Une approche plus lucide partirait du constat du premier paragraphe ici, celui d’un risque majeur de chômage et de sous-emploi structurel (cf. p.20 où le défi est souligné encore). C’est le constat du rapport sur les risques depuis des années, mais il n’en est rien ici. On cherche au Niger un exemple de ce qui pourrait se faire…

Un premier groupe d’indicateurs 2,01-2,14 dans ce pilier vise les conditions de travail alors qu’un deuxième groupe 2.15-2.28 s’attaquent à la compensation, que cela soit par salaires ou autrement. On voit que deux-tiers du salaire médian est le minimum acceptable et un revenu en bas de 2$/jour est jugé mauvais. Il y a un indicateur pour le taux de membership dans des syndicats, un autre couvrant l’accès à du «collective bargaining» et un troisième couvrant le degré d’atteinte de coopération… D’autres indicateurs touchent la présence de garderies et de congés de maternité. C’est le début d’une description de nos rêves qui sera compléter par la présentation des indicateurs pour les autres piliers.

Pour nous ramener à terre, la méthodologie établit (p.57) une limite pour la valeur attribuée à plusieurs de ces éléments, lorsqu’ils sont jugés négatifs pour la croissance; la même approche est utilisée dans le septième pilier relatif aux éléments fiscaux, ainsi que d’autres moins clairement identifiés. Le classement de 1 à 7 pour chacun des 140 indicateurs pour chaque pays est fonction de réponses à des sondages, dans les différents pays, auprès de 14,000 membres du réseau du Forum, et on peut bien se demander comment de telles évaluations sortent des ornières du développement depuis des décennies, pour suggérer la possibilité d’inclusion.

Pour le troisième pilier, les PME sont la cible d’une importante série d’indicateurs 3.01-3.10; un deuxième groupe 3.11-3.17 portent sur les questions de propriété, mobilière ou immobilière. Les indicateurs vont jusqu’à encourager la propriété par les travailleurs, des parts dans leurs compagnies et le partage des profits. Le quatrième pilier insiste sur les liens positifs  entre le secteur financier et l’économie réelle, un premier groupe 4.01-4.07 mettant un accent sur le crédit accessible et un deuxième 4.08-4.20 comporte un ensemble d’indicateurs ciblant l’activité du secteur privé et l’investissement dans l’économie réelle, dont la création d’entreprises, l’accès au crédit et un encadrement approprié. Cela met la table pour le cinquième pilier, qui cible la corruption dans différentes formes avec un premier groupe d’indicateurs 5.01-5.05 couvrant l’éthique en affaires et en politique et un deuxième 5.06-5.11 portant sur la concentration des rentes – les inégalités des revenus.

Le sixième pilier porte sur les services publics et les infrastructures, tout d’abord les indicateurs 6.01-6.12 visant ceux de base, incluant les technologies digitales, mais également un indicateur sur la population résidant dans des bidonvilles et un autre sur la population sans accès aux services de base. Un deuxième groupe 6.13-6.21 touche les infrastructures et services en santé, incluant même un indicateur sur la pollution de l’air.

Au fur et à mesure du survol des indicateurs dans le cadre du travail, on constate l’effort de prendre en compte l’énorme étendu des enjeux sociaux et économiques de nos jours. Lorsque l’on regarde dans le détail, on trouve des prémisses conformes aux orientations des institutions internationales, guère une surprise. On trouve également, et c’est plutôt surprenant, la prise en compte d’enjeux sociaux négligés dans ces orientations, comme l’existence de bidonvilles où vont se trouver presque l’ensemble des deux milliards de personnes prévues avec la croissance démographiques d’ici 2050.

Comme les auteurs soulignent, les défis associés aux différents indicateurs – aux différentes interventions qu’ils sont censés inspirer – varient selon les pays. Ceci n’est peut-être pas plus clairement le cas que pour le septième pilier, touchant les transferts fiscaux, dont les impôts. Un premier groupe 7.01-7.09 permettrait de cerner le rôle des taxes dans un pays, et un deuxième groupe 7.10-7.22 porte sur la protection sociale, précisément les différentes facettes des interventions ciblant l’inégalité en termes de services de base autres que les infrastructures, dont l’assurance chômage, les pensions, les dépenses publiques et leur efficacité. Mais toujours, là où les interventions suggérées par un indicateur nuiraient à la croissance, le calcul est interrompu.

Les nombreuses calibrations des 140 indicateurs visant à classer les quelque 112 pays traités donnent l’image d’une évaluation chiffrée du potentiel de réduction des inégalités, dont l’atteinte est associée à une sensibilisation venant de ce travail des décideurs de Davos (et d’autres travaux à venir). Un regard porté sur quelques indicateurs montre rapidement qu’il y a conflit évident – pour le lecteur non engagé d’office sur la voie de la croissance (inclusive) – entre la croissance et l’introduction de mesures suggérées par les indicateurs. Il n’y a même pas d’indication de prises de position politiques explicites dans l’interprétation de ces indicateurs, celles-ci restant implicites dans les réponses aux sondages; ils sont tous présentés en fonction de leur intérêt économique plutôt théorique. Comme la Conclusion de la Partie I le souligne, «This Report should be seen as marking the start of an ongoing process. Empirical research on the topic of inclusive growth is still emerging.» (p.63)

Croissance verte, disparition des inégalités, promotion d’énergies non polluantes: même problème

Les auteurs du document de Davos insistent:

There is no inherent trade-off in economic policy-making between the promotion of social inclusion and that of economic growth and competitiveness; it is possible to be pro-equity and pro-growth at the same time… Seen from this practical, evidence-based perspective, the current debate on inequality and social inclusion is unduly narrow and unnecessarily polemicized. It is possible, indeed essential, to be pro-labor and pro-business, to advocate a strengthening of both social inclusion and the efficiency of markets. (p.viii)

 

Ce sont des jugements à l’image de ceux qui motivent l’adhésion à l’économie verte, qui s’appelle justement la croissance verte selon le contexte. Pour prendre l’exemple tout récent, le Manifeste pour un grand bond en avant maintient presque sans le réaliser l’engagement envers la croissance – c’est une sorte de reflet miroir du document de Davos. Il commence avec les inégalités, incluant les autochtones chez nous. Et ses signataires soulignent le développement durable au départ comme une valeur clé, l’endossant comme slogan sans la moindre prise en compte des dérapages à son égard depuis un quart de siècle.

À cet égard, le texte rejoint le travail de Davos dans son optimisme sans fondement:

Nous pourrions vivre dans un pays entièrement alimenté par des énergies réellement renouvelables et justes, traversé de réseaux de transport public accessible, où les emplois et autres possibilités qu’offre une telle transition sont aussi conçus pour éliminer systématiquement les inégalités raciales et entre les genres. Prendre soin de la planète et les uns des autres pourrait créer de nouveaux secteurs économiques très dynamiques. Beaucoup plus de personnes auraient accès à des emplois mieux payés et travailleraient moins longtemps, ce qui nous laisserait amplement le temps de profiter de la présence de nos proches et de nous épanouir dans nos communautés… Nous exigeons des sources d’énergie qui ne s’épuiseront jamais, pas plus qu’elles n’empoisonneront la terre. Les avancées technologiques ont mis ce rêve à notre portée… L’argent nécessaire pour effectuer cette grande transition est accessible, il ne reste qu’à implanter les bons programmes d’action pour libérer ces sommes.

Se fondant sur Dialogues pour un Canada vert, le Manifeste fonce comme Davos dans le rêve. C’est le temps que nous agissions ensemble, non pas avec des manifestes comme les deux derniers ou le déni de Davos, mais en construisant une approche qui reconnaît que le développement que nous pourrons nous permettre ne sera pas celui «durable» du rêve des années 1980, mais un d’une énorme sobriété et exigeant, non pas le rêve pour une énergie illimitée et inépuisable, mais l’espoir d’une communauté résiliante vivant en harmonie avec le planète et dans le respect de contraintes importantes exigées par la planète.

Actuellement, au Canada, au Québec, les adhérents à ce dernier Manifeste oublient que nous sommes déjà responsables d’une empreinte écologique qui exigerait trois de ces planètes tant béatifiées, cela alors que les «autochtones» des pays pauvres, dans leurs milliards, vivent dans une misère à laquelle les «solutions» du Manifeste ne s’adressent même pas – pas plus que le déni de Davos face à ses constats de risques devenus des crises. Au moins Davos vise l’ensemble de la planète…

 

 

 

 

 

 

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